Autorisations de voyage électroniques: un visa sous un autre nom?

Les AVE sont considérées comme une forme d’autorisation électronique préalable que les pays de destination peuvent exiger des voyageurs avant d’entreprendre leur voyage. Elles sont généralement réservées et destinées aux voyageurs qui remplissent déjà les conditions d’entrée sans visa (et dont on sait peu de choses avant leur départ) et visent à rationaliser le processus de voyage tout en ajoutant un contrôle préalable de la sécurité et une efficacité des données à ce processus numérique et souvent largement automatisé. À l’instar d’un visa, il est important de reconnaître qu’une AVE n’autorise son titulaire qu’à se rendre dans le pays qui l’a délivrée, et que l’entrée dans ce pays reste soumise à la décision finale des agents d’immigration à la frontière.

Les AVE permettent au pays émetteur d’identifier certains risques posés par des voyageurs individuels en comparant leurs coordonnées à des bases de données nationales ou internationales, parfois pour dépister des maladies infectieuses (certaines AVE peuvent exiger du demandeur qu’il se soumette à un examen de santé pour des raisons de santé publique), ou pour vérifier l’existence d’un casier judiciaire (critères de moralité). Certaines informations sont recueillies auprès du demandeur lui-même, tandis que d’autres peuvent être obtenues par d’autres moyens, par exemple par des recoupements automatisés effectués par le pays d’accueil avec des informations déjà disponibles ou contenues dans des bases de données internationales et d’autres sources. Des algorithmes peuvent également être développés pour aider à détecter d’autres facteurs de risque.

Bien que les AVE ne soient pas monnaie courante dans les régimes de voyage africains, plusieurs systèmes électroniques permettant de gérer à l’avance les arrivées de voyageurs exemptés de visa sont en place depuis plusieurs décennies dans d’autres pays. L’Australie (1996) a été la première à adopter l’AVE, suivie par les États-Unis (2008) et le Canada (2015)4. Plus récemment, le Royaume-Uni a introduit une AVE limitée (fin 2023), tandis que l’Union européenne (UE) prévoit de lancer sa propre AVE5 d’ici à la mi-2025. Plusieurs autres pays proposent des systèmes d’AVE, notamment la Corée, la Nouvelle-Zélande et le Mexique, tandis que la Thaïlande, Israël et le Japon prévoient de lancer prochainement une AVE pour les citoyens qui remplissent les conditions d’entrée sans visa.

Globalement, les AVE présentent plusieurs caractéristiques communes. Le plus souvent destinées à des séjours de courte durée (90 jours ou moins), elles couvrent généralement des entrées multiples dans un pays et sont valables plusieurs années, deux ou trois ans étant la norme, et jusqu’à cinq ans (Canada). Elles ne se limitent pas non plus aux voyages touristiques, mais tendent à couvrir certaines catégories de voyages d’affaires, voire d’études de courte durée. Une clause conditionnelle générale stipule qu’un voyage d’affaires au titre de l’AVE ne comprend pas un gain de revenus d’une compagnie locale ; en d’autres termes, le travail ou les ventes sur place ne sont pas autorisés, alors que la participation à des conférences, à des salons professionnels et à des réunions d’affaires l’est. Les AVE n’exigent généralement pas non plus du demandeur qu’il fournisse un itinéraire de voyage détaillé et se limitent généralement à des données biométriques de base ainsi qu’à des questions relatives à la sécurité et à l’état de santé. En ce qui concerne le coût, il est généralement compris entre 5 et 15 USD, plusieurs pays facilitant le processus de demande par le biais d’une application de téléphone intelligent dédiée.

Pour les citoyens des pays africains – et de l’étranger – qui devaient auparavant obtenir un visa avant de voyager, l’AVE offre toutefois des améliorations en termes de facilité d’utilisation, de gain de temps et de coût, par rapport à l’obtention d’un visa avant le voyage. 

L’attrait d’une AVE, notamment en ce qu’elle permet de numériser certains aspects du processus d’immigration pour les voyageurs, à des fins de sécurité nationale par le biais d’un contrôle préalable, pour la collecte d’informations de base et la gestion de données, ainsi que pour des avantages en termes d’efficacité, ne peut être contesté. Du point de vue des voyageurs, en termes d’assouplissement et de facilitation de la circulation des personnes à travers les frontières, les avantages sont souvent minces et dépendent entièrement des aspects substantiels et des coûts de l’AVE. Les coûts nouveaux ou supplémentaires supportés par les voyageurs, qui vont au-delà d’une contribution symbolique au recouvrement des coûts du système par le pays d’accueil (compte tenu des améliorations démontrables de l’efficacité et des économies réalisées sur les frais généraux et les infrastructures des pays en matière d’immigration), les délais d’obtention de l’AVE qui compromettent les voyages spontanés, la nécessité de confirmer les itinéraires et l’hébergement, sont autant d’obstacles à la libre circulation des personnes et compromettent les avantages inhérents que les systèmes d’AVE sont susceptibles d’offrir. La frontière entre les systèmes d’AVE, parfois onéreux, et les procédures de visa électronique devient floue.

Comme dans d’autres juridictions, les AVE devraient, au minimum, être liées électroniquement, dans le système d’immigration du pays d’accueil, aux détails du passeport et aux données biométriques du demandeur, et prévoir des périodes de validité beaucoup plus longues que ce n’est le cas actuellement. Une AVE ne nécessitant que des informations de base de la part du demandeur (une copie du passeport et des informations de base connexes) pourrait alors être considérée comme un instrument de sécurité valable pour le pays d’accueil plutôt que comme un visa déguisé. 

Plusieurs des AVE mentionnées ci-dessus présentent des aspects qui réduisent les frais généraux pour les voyageurs tout en répondant aux priorités des pays d’accueil en matière d’efficacité du système d’immigration et de sécurité dans le cadre des voyages en leur direction.


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