Ouverture des régimes de visa en Afrique : quels progrès depuis 2016?

Facilitation des voyages pour les Africains

Depuis 2016, date de la première publication de l’IOVA, l’indice s’appuie sur trois indicateurs principaux pour mesurer l’ouverture des régimes de visa en Afrique. Selon l’édition de cette année, ces trois indicateurs affichent une nette amélioration depuis qu’ils ont été mesurés pour la première fois, il y a huit ans.
 

Le premier indicateur est l’exemption de visa, l’étalon-or de l’ouverture des régimes de visa. Dans 28 % des scénarios de voyage d’un pays à l’autre en Afrique, les citoyens du continent n’ont pas besoin de visa pour franchir la frontière. Il s’agit d’une nette amélioration par rapport à 2016, où l’entrée sans visa n’était possible que dans 20 % des scénarios. Cet indicateur d’ouverture – qui implique qu’aucun visa n’est exigé – enregistre ainsi sa note la plus élevée. 

Le deuxième indicateur concerne les visas à l’arrivée. L’incidence des régimes de visa à l’arrivée a peu évolué au fil des ans. En 2016, les voyageurs africains pouvaient obtenir un visa à l’arrivée dans 25 % des scénarios de voyage. Ce chiffre est aujourd’hui de 26 %. Mais la stagnation apparente de cette donnée est trompeuse. En effet, certains pays ont abandonné l’obligation d’obtenir un visa préalable pour adopter le visa à l’arrivée, ce qui a entraîné une augmentation de l’incidence des régimes de visa à l’arrivée. D’autres pays sont passés d’un régime de visa à l’arrivée à un régime d’exemption de visa, ce qui a entraîné une baisse de l’incidence. Dans les deux cas, cependant, l’évolution a facilité les déplacements des Africains. 

Le troisième indicateur concerne les voyages pour lesquels les Africains doivent obtenir un visa avant leur départ. À l’instar de l’indicateur relatif aux voyages sans visa, l’indicateur relatif à l’obtention préalable d’un visa s’est considérablement amélioré depuis 2016. Il concerne aujourd’hui 46 % des scénarios de voyage d’un pays à l’autre, contre 55 % il y a huit ans. En outre, dans bien plus de scénarios aujourd’hui qu’en 2016, les Africains ont accès au visa électronique. Si le visa électronique ne remplace pas l’exemption de visa, il permet tout de même d’alléger considérablement le fardeau des préparatifs de voyage.

La conséquence de l’amélioration des trois indicateurs est qu’en 2023, les 54 pays du continent obtiennent en moyenne leur meilleure note IOVA à ce jour. La moyenne des 10 pays les plus performants du continent a également atteint un nouveau sommet.
 
Au total, 15 pays ont amélioré leur note par rapport à l’année dernière : trois d’entre eux figurent parmi les dix premiers, trois autres se classent parmi les 20 premiers, quatre pays se situent dans la tranche intermédiaire du classement et cinq pays occupent les 15 derniers rangs de cette année. Cette répartition est encourageante : elle montre que l’ouverture des régimes de visa s’est améliorée à tous les niveaux de performance.

Quels sont les pays qui ont le plus progressé?

Depuis la première édition de l’IOVA, 36 pays ont amélioré leur note. En outre, le nombre de pays disposant d’un régime de visa électronique a plus que doublé (ils sont désormais 24). Les politiques africaines en matière de visa à l’égard des citoyens du continent n’ont jamais été aussi libérales.

Six des 10 pays qui ont le plus progressé depuis 2016 se trouvent en Afrique de l’Ouest, tandis que l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe se répartissent à parts égales les 4 pays restants. La plus forte augmentation nominale en matière de note IOVA depuis 2016 a été réalisée par l’Éthiopie (Afrique de l’Est), qui se classe 19e sur 54 pays (en baisse par rapport à sa 17e place en 2022). La note enregistrée par l’Éthiopie aujourd’hui est inférieure à celle de 2019-2020.

La deuxième plus forte augmentation nominale depuis 2016 a été enregistrée par le Bénin. Le Bénin est un des pays d’Afrique les plus ouverts en matière de visa : il figure parmi les premiers du classement depuis 2018. 

Après l’Éthiopie et le Bénin, les pays dont la note a le plus grimpé sont le Ghana, le Nigéria et la Gambie. Ces trois pays ont considérablement ouvert leur régime de visa depuis 2016, même s’ils partaient pour la plupart de très bas. Il est à noter que les trois pays sont membres de la CEDEAO, la communauté économique régionale ayant la moyenne régionale la plus élevée et le plus fort taux de réciprocité en matière d’exemption de visa parmi ses États membres. Le Sénégal et la Sierra Leone, tous deux également membres de la CEDEAO, figurent aussi sur la liste des pays dont la note IOVA s’est nettement améliorée depuis 2016. 

Parmi les cinq pays dont la note a le plus augmenté depuis 2016, la Gambie occupe la première place (avec d’autres États) depuis l’édition 2020 de l’IOVA. Le Ghana et le Nigéria se partagent la cinquième place. Le Ghana n’exige de visa préalable que pour les ressortissants de deux pays. Il applique une politique d’exemption de visa vis-à-vis de la moitié des pays restants et une politique de visa à l’arrivée pour l’autre moitié. La montée du Nigéria dans le classement est la conséquence de l’abandon par le pays de l’obligation pour les ressortissants africains d’obtenir un visa avant leur arrivée. Il accorde désormais une exemption de visa aux citoyens de 17 pays et propose un visa à l’arrivée aux citoyens de 36 pays. 

Le Rwanda, un des deux pays d’Afrique de l’Est occupant le sommet du classement au titre de l’IOVA, est le neuvième pays dont la note s’est le plus améliorée depuis 2016. Le Rwanda a récemment adopté un régime d’exemption de visa, ce qui explique qu’il soit passé de la cinquième position en 2022 à la première en 2023. 

Les pays d’Afrique australe figurent également parmi les pays dont la note a le plus évolué depuis 2016. L’Angola et la Namibie font partie des 10 pays qui ont le plus progressé, le premier partant de très bas. L’Afrique du Sud, le Malawi, São Tomé-et-Príncipe et le Zimbabwe ont également réalisé des progrès considérables, bien que seuls le Malawi et le Zimbabwe se trouvent dans la première moitié du classement des pays les plus performants au titre de l’IOVA. 

En Afrique du Nord, l’Égypte et la Tunisie figurent parmi les 20 pays dont la note a le plus augmenté depuis 2016. Tous deux se classent dans la moitié inférieure du classement des pays selon l’indice IOVA.
 

L’adoption du visa électronique

 En ce qui concerne les visas électroniques, les progrès ont été lents cette année. En effet, après l’enthousiasme initial démontré par les pays en faveur de la mise en place d’un système de visa électronique – qui devait permettre d’alléger la charge du voyage pour les visiteurs et de délester les autorités responsables de l’immigration de certaines tâches administratives – peu de progrès ont été accomplis au cours des quatre dernières années. Aujourd’hui, moins de la moitié des pays africains proposent un quelconque type de visa électronique, alors qu’un tel système simplifierait grandement la tâche aux voyageurs qui sont toujours tenus d’obtenir un visa avant leur départ à l’étranger.
 
La mise en place de systèmes de visas électroniques fiables, accessibles et généralisés ouvre la voie au progrès et à l’innovation. Bien qu’elle ne contribue pas à faire progresser l’ouverture des régimes de visa, elle permet néanmoins d’améliorer l’expérience de voyage des citoyens qui doivent encore obtenir un visa avant leur départ.
 

L’impact des conflits sur l’ouverture des régimes de visa

Les conflits entre pays ou entre régions d’un même pays peuvent entraîner le déplacement d’un grand nombre de personnes, souvent de manière soudaine et au-delà des frontières. Les autorités peuvent réagir en limitant les déplacements et en exigeant l’obtention de visas. Elles peuvent également refuser l’entrée à certains voyageurs et pas à d’autres ou fermer purement et simplement les frontières, parfois sans préavis et toujours au prix d’un lourd tribut pour les populations. Les bouleversements politiques et les changements de régime non démocratiques contribuent au phénomène.
 
Les régions en proie à des conflits ou à l’instabilité politique peuvent percevoir la libre circulation des personnes comme un risque pour la sécurité et invoquer la nécessité de contrôler plus étroitement les déplacements à l’intérieur du pays. Quant aux pays, les conflits ont tendance à focaliser toute leur attention et absorber leurs ressources. Si le conflit a mis à mal les processus parlementaires et les structures de gouvernance démocratique, la marge de manœuvre des pays est encore plus réduite.
 
Pour ces raisons, les conflits ont souvent une incidence sur les performances des pays au titre de l’IOVA, parfois importante.